LES ANCIENS DU 15.1

 

 

RANCOURT- VERDUN


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Germersheim 31 mars 1945

 

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Le franchissement du Rhin : un fait d’armes méconnu

Par Clément Charrut

C’est une évidence de dire que le rôle de l’Armée d’Afrique dans la libération de l’Europe est méconnu de nos concitoyens on a pu ainsi lire dans ces pages (*) le récit des combats du Hohneck avec le 4° RTT de décembre 1944. Voici le récit du franchissement du Rhin par les éléments de tête de la Première Armée, celle ci connue aussi comme « l’Armée De Lattre » n’était rien d’autre que le Corps Expéditionnaire Français (C.E.F.) d’Italie du Général Juin les quatre divisions d’infanterie, les goums et de nombreuses unités non endivisionnées d’artillerie, du génie et de soutien) complété à partir d’août 1944 par les trois divisions blindées et le 9°DIC. Le 101° régiment du génie, qui n’a existé que de 1944 à 1946, a joué un rôle essentiel auprès de l’infanterie dans l’opération de franchissement du Rhn.

Le 16 février 1944 à Georges Clémenceau, petit village d’Oranie, le 101° RG est crée à partir de deux bataillons de plage sur le type US; le 3° BG déjà sur place en baie d’Arzew et le 2° BG stationné à Cap Matifou et Fort de l’Eau.

Parmi les cadres et sapeurs, nombreux sont ceux qui ont participé à la bataille de Tunisie en 1942/1943. Le régiment participe bien sûr à la dure campagne d’Italie, pour partie en Italie continentale et pour partie (la 1° Cie du Lieutenant Vidal) à l’île d’Elbe.

Après les campagnes d’Italie et de France, les troupes sont épuisées et les efforts demandés toujours soutenu. Après le terrible hiver alsacien 1944/1945 et la réduction de la poche de Colmar début février 1945, l’accalmie est brève et l’apport en FFI est décevant, comme l’avait déjà écrit De Lattre au chef du gouvernement en décembre 1944 dans une lettre édifiante (cf. Histoire de la première armée, par De Lattre ou encore Le onzième commandement par André Rossfelder).

Néanmoins, les intérêts politiques sont exacerbés par l’entrée des Alliés en Allemagne ce qui signifie la fin prochaine de la guerre. On commence à penser qui prendra place à la table des vainqueurs. La victoire d’Italie ayant été injustement occultée par les opérations en Normandie, il est clair que pour l’instant la France fait encore partie des vaincus de la deuxième guerre mondiale. Il faut la ranger du coté des vainqueurs et ce sera le rôle de cette armée venue d’Afrique du Nord formée et équipée par les USA, Giraud étant à cet égard le véritable « organisateur des armées de la victoire » comme l’a écrit l’historien Paul Gaujac (ancien chef du service historique des armées). Or les Alliés n’ont pas prévu d’utiliser la Première Armée Française.

De Lattre finit par obtenir un créneau sur le Rhin entre Spire et la frontière françaises sous la pression de De Gaulle, chef du gouvernement provisoire, qui tient à ce que les forces françaises soient présentes sur la rive droite du fleuve, « dussiez vous le franchir en barques »a-t-il écrit à De Lattre. C’est ce que fera d’une certaine manière le 3° RTA (de la 3°DIA) à Spire au matin du 31 mars 1945 sur de modestes canots pneumatiques en bénéficiant de la faible présence ennemie sur la rive opposée.  Par contre, plus au sud, vers Germersheim, les choses se passeront bien plus mal pour la 2° Division d’Infanterie Marocaine, car dans son secteur la rive droite est encore solidement tenue par l’ennemi ! Le matériel de franchissement manque cruellement (seulement 125 bateaux US-M2 que l’on assemble par deux pour transporter un groupe de combat) et il faudra la fraternité d’armes et l’estime des Américains (estime conquise en Italie !) pour que la Première Armée reçoive un renfort de bateaux, hélas ! Encore en nombre insuffisant.

Ce sont les fantassins de la 2° DIM et les sapeurs du 101°RG qui paieront le tribut nécessaire à la présence des Français de l’autre coté du Rhin, par leur sacrifice dans un franchissement de vive force, heureusement pas tout à fait oublié aujourd’hui, puisqu’un exercice annule majeur du 1° Régiment du Génie est baptisé »Germersheim ».

Depuis le 28 mars, les éléments du génie stationnent dans la forêt entre Germersheim et le petit village de Mechtersheim  dans le secteur de la 2° DIM (Cf. carte). En effet, contrairement à ce que l’on croit souvent, le franchissement du Rhin n’a pas eu lieu de France en Allemagne sur la frontière inter-étatique (trop bien défendue par la ligne Siegfried), mais bien plus au nord en territoire allemand. Le 29, ont lieu les reconnaissances des lieux de franchissement et le stockage des matériels dans la forêt. Le 30 à 11 heures par vient à la 1° compagnie/101RG l’ordre d’aménager la « plage A » proche de Mechtersheim. La compagnie est alors articulée pour le lendemain 5 heures, en seize postes d’embarquement sur le bras mort du Rhin et en vingt équipes de deux propulsistes pilotant les bateaux d’assaut US-M2.

Les bateaux sont assemblés et vérifiés, mais pour des raisons de discrétion, des moteurs neuf ne peuvent être essayés. A 22 heures, un mauvais présage survient sous la forme d’un tir de mortiers faisant neuf blessés parmi les sapeurs, puis des tirs irréguliers peu denses pendant la nuit, espacés de trente minutes à une heure, tenant tout le monde en éveil. Il faut aussi se protéger contre des éléments légers ennemis encore présents sur la rive gauche du Rhin et non décelés par les unités US qui tenaient le secteur jusque-là.

Le 31 mars 1945, après une préparation d’artillerie de quinze minutes sur la rive droite du Rhin, c’est le départ de la première vague de quinze bateaux d’assaut depuis la plage A à 5h15 dans le bras mort en direction du fleuve avec le 5°Cie. /151 RI du lieutenant Rodriguez.

Le 151° RI qu’avait commandé le colonel De Lattre avant-guerre, et qu’il a tenu à reconstituer, n’est autre que le 8° RTM dont les Marocains ont été relevés par des FFI essentiellement parisiens et dont on a conservé les Européens. Les bateaux entament leur navigation en silence en se laissant porter par le courant du bras mort (photo ci dessous) et au moment de se lancer dans le Rhin proprement dit, certains moteurs refusent de démarrer.

De plus, la préparation d’artillerie n’a pas obtenu l’effet escompté et des tirs ennemis intenses font échouer totalement la tentative : tirs d’artillerie et de mortiers, tirs d’armes automatiques depuis la rive opposée à hauteur de deux casemates qui protègent l’entrée du vieux Rhin rive droite, mais aussi tirs d’armes automatiques par des éléments isolés depuis la rive droite du bras mort avant le débouché sur le Rhin. C’est un échec sanglant.

Après le nettoyage des bois rive gauche par une section du 151°RI, à 14h30 est lancée une deuxième vague de dix bateaux : trois sont touchés dans le bras mort avant même le débouché sur le fleuve, deux sont coulés, trois partent à la dérive, deux seulement parviennent à accoster et à se maintenir sur la rive droite avec une vingtaine de fantassins aux ordres du sous lieutenant Calligaris. La neutralisation des blockhaus par un tank-destroyer M10 du 2° Dragons permet de relancer à 18h30 une troisième vague de trois bateaux dont un seul atteint la rive ennemie avec le lieutenant Rodriguez et son observateur d’artillerie.

L’abandon de la plage A s’impose avec le report du 151° RI sur la plage B plus au sud.

La plupart des bateaux de la 1° Cie du 101° génie ont été détruits ou perdus. Certains propulsistes ont effectué deux fois le trajet sous le feu, ramenant parfois leur bateau M2 rempli de morts et de blessés.

A la nuit vers 19h30, seuls 48 hommes de la 5°Cie/151 se trouvent sur la rive droite aux prises avec un point d’appui ennemi autour de deux casemates. L’une est détruite aux dernières lueurs du jour par un tir de tank-destroyer et l’autre est conquise par des fantassins qui sont rejoints, alors qu’ils ne sont plus que huit valides auprès des dix tués et trente blessés par la 6°Cie/151 ayant franchi la plage B. Au lever du jour suivant, Philipsburg, le village le plus proche du secteur de franchissement A, est occupé.

Le 151° RI a perdu 88 hommes !

Le bilan des pertes de la 1°Cie/101RG est de douze tués (caporal Ruffenac, maître ouvrier Grosse, sapeurs Sicard, Genileau, Pierron, Raulion, Boulletoux, Bouzelfa, Aucomte, Tigre, Boutet et Torres), trois disparus (sergent chef Durousseau, caporal-chef Reinardt et sapeur Oriol) et vingt quatre blessés.

Le bilan définitif est établi seulement après plusieurs jours comptés au soir du 31 mars, certains sont retrouvés morts, comme Fernand Torrès, ou blessé comme le sergent chef Garnier soigné dans un hôpital allemand et retrouvé trois semaines plus tard.

Les morts sont inhumés au cimetière de Mechtersheim autour d’une stèle. Cette compagnie du génie avait perdue seize hommes en quelques instants au débarquement de l’Ile d’Elbe le 17 juin 1944. Au sud de la plage B (plus proche de Germersheim la 3° Cie du 101 RG (Lt. Perdu) a la même mission mais au profit du 4° RTM et le franchissement se fait également sous le feu ennemi.

La première vague de douze bateaux à 6h40, la deuxième vague de quinze bateaux à 7h45, assurant le passage de 320 hommes du 4° RTM. La traversée se poursuit par bateaux isolés en remplaçant les propulsistes, les bateaux ou les moteurs au fur et à mesure des pertes au passage d’un bataillon d’infanterie complet vers midi. La 3° Cie/101°RG a perdu sept soldats tués ou disparus (sergent chef Dumay, caporal Gros, Sapeurs Alenda, Sanchez, Jurretich, Marco, Nicolas et le sapeur Guerder du 17° RCG).

Les fantassins du 4° RTM ont perdu 28 hommes.

Au total 90 propulsistes engagés le 31 mars par le 101°RG et les autres unités du génie le renforçant

17° Régiment Colonial du Génie    211° Bataillon de Ponts Lourds     96° Bataillon du Génie/5°DB

Trente-quatre sont morts et les trois quarts des bateaux ont été détruits.

Un an plus tard exactement, le 31 mars 1946, un monument commémoratif sera inauguré par le général De Lattre sur la digue entre le bras mort et le fleuve en présence du drapeau du 1°RG, nouveau numéro attribué récemment au 101°RG dissous.

Le même jour à Spire sera inaugurée une stèle souvenir du franchissement du 3° RTA

Le 7 avril 1945, sur la place de la cathédrale de Spire, avant l’inauguration officielle du pont construit par la 2°Cie/101, une cérémonie présidée par le général De Lattre en l’honneur du 101°génie au cours de laquelle le président du gouvernement provisoire procède à une remise de décorations ;Croix de guerre au drapeau du régiment ;Croix de guerre avec palme - S/Lt. Cartier,  caporal chef. Touisson, caporal. Lopez, Sapeurs Courtaud, Sylvano, Garcia et Charrut.

Sur la photo ci dessous, le jeune sapeur décoré de la croix de guerre avec palme était un des valeureux « propulsistes ».

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Il venait de Maginot, village des Hauts Plateaux au sud d’Alger où il repartit quand il fut démobilisé après avoir accompli comme tant d’autres trois années de campagne ininterrompue……..

Le monument sur le Rhin a été détruit lors d’un naufrage d’une péniche.

Un nouveau a été reconstruit au même endroit

Les restes se trouvent à Illkirch-Graffenstaden au quartier du 1° régiment du génie

 

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